Essonne – De l’Alaska au Gâtinais : le parcours étonnant d’un linguiste de 28 ans

Rencontre avec Guillaume Leduey, nouvel habitant de Boutigny-sur-Essonne, passionné par les langues étrangères.

Au hasard de ses recherches, il découvre à 13 ans une langue amérindienne d’Alaska qui n’est plus parlée que par une seule personne. Convaincu de l’intérêt de la préserver, il décide de l’apprendre en secret, reclus dans le confort de sa petite chambre du Havre. Quinze ans plus tard, le voilà corédacteur du dictionnaire de cette langue aujourd’hui considérée comme éteinte, langue qu’il enseigne, par ailleurs, aux descendants de ce peuple orphelin : les Eyaks.

Le Républicain : Comment est née votre passion pour l’eyak ?

Guillaume Leduey  : L’idée d’apprendre une langue parlée à l’autre bout du monde m’a toujours paru très exotique. C’est un moyen de voyager tout en restant chez soi. En 2002, quand j’ai contacté l’Université d’Alaska pour leur demander de bien vouloir m’envoyer les documents qui m’aideraient à réaliser mon rêve, je ne parlais pas un mot d’anglais. C’est dire si j’étais téméraire… Dans le colis qui m’a été envoyé figurait une série de cassettes audio contenant l’enregistrement de plusieurs contes et légendes eyaks. J’ai tout de suite été bouleversé par cette langue. Ce jour-là, j’ai également reçu un exemplaire du livre « In Honor of Eyak » dans lequel ces histoires ont été retranscrites. Je me revois encore sur mon lit, le lecteur cassette posé devant moi et ce livre entre les mains, tentant péniblement de suivre le cours du récit. Je repérais dans le texte certains des mots que j’entendais, c’était magique ! Le livre en question a été rédigé par Michael E. Krauss – spécialiste mondial de l’eyak, un très grand linguiste – lequel est devenu, des années plus tard et à la suite de multiples rencontres, mon directeur de recherches. Sans le savoir, j’organisais déjà ma carrière.

Le Républicain : Pourquoi est-il important que cette langue ancestrale ne disparaisse pas totalement ?

Guillaume Leduey  : Malheureusement, ce phénomène ne concerne pas que l’eyak. Tous les 15 jours, une langue disparaît dans le monde. Sauver une langue, c’est aussi sauver la culture qu’elle transmet. C’est une parcelle de l’humanité qui est préservée, une voix dans le monde qui ne s’est pas éteinte.

Retrouvez l’intégralité de cet article dans nos éditions papier et numérique du jeudi 23 novembre.