More

    Essonne : le chanvre une culture ancestrale et d’avenir

    Le Républicain de l’Essonne s’engage avec IledeFrance Terre de saveurs, organisme associé à la Région Ile-de-France présidé par le conseiller régional Gérard Hébert, pour valoriser l’identité du territoire francilien et le faire partager par tous. Cette valorisation passe par la nouvelle marque de territoire « Produit en Ile-de-France » née en 2018. Cette marque compte d’ores et déjà 1 400 produits dont un nombre important proviennent du territoire essonnien. Ce sont ces productions du terroir de notre département que votre journal présentera chaque semaine dans cette page.

    Le chanvre a repris sa place ces dernières années dans le paysage agricole essonnien. Ces derniers jours, la récolte du chanvre s’est terminée dans les parcelles. Pour les exploitants du département, qui consacrent près de 1 000 hectares à cette culture, les débouchés sont multiples.

    Le chanvre est l’une des plus anciennes cultures qu’on peut retrouver dans les parcelles agricoles, étant déjà cultivée avant même le Moyen Age. Il faut dire que c’est une plante dont chaque partie peut servir.

    La graine, qu’on appelle le chènevis, une fois pressée, donne une huile vierge de chanvre avec de nombreuses vertus. « C’est une huile saine avec une valeur nutritive élevée et un très bon équilibre en oméga 3 et oméga 6. En augmentant la quantité de « bonnes graisses » dont notre cœur à besoin, elle lutte contre les maladies cardiaques et les risques de cholestérol », explique-t-on à la Maison du Chanvre d’Isabelle et Olivier Desforges.

    Une gamme alimentaire et cosmétique

    Le kemper des moissonneuses-batteuses est adapté pour la récolte du chanvre.

    Dans cette exploitation de Bouville où le chanvre a repris sa place en 2012, on produit du chanvre et on le transforme. Il y a donc cette huile alimentaire à forte valeur nutritive, mais également la farine de chanvre, sans gluten, que l’on peut utiliser en complément de la farine de blé, les graines de chanvre, onctueuses et savoureuses, qui peuvent accompagner fruits et légumes, ou encore des infusions à base des feuilles et fleurs de chanvre encore vertes cueillies à la main et séchées dans les greniers de la ferme.

    Le chènevis est aussi un aliment utilisé en oisellerie. Etant très riche en protéïne, il répond parfaitement aux besoins des perruches et canaris. Il est également un appât à poisson très efficace. Il prendra la forme de tourteau de chènevis. Issu de l’extraction d’huile par pressage à froid des graines de chanvre, il se présente sous la forme de granulés. Là encore, sa teneur en protéines en fait un appât idéal pour la pêche au gardon et à la brême tout en étant 100 % naturel et biologique.

    Mais le chanvre a bien d’autre cordes à son arc. Il peut servir à faire du savon, une des raisons pour laquelle on le cultivait déjà il y a des siècles. L’huile de chanvre dans les savons apporte aux savons naturels ses propriétés hydratantes, régénérantes et calmantes. Un processus de saponification à froid permet de préserver les propriétés et les vertus de chaque huile, chaque beurre. La glycérine formée naturellement est ainsi entièrement conservée.

    A côté de la graine, la chènevotte, la partie intérieure rigide de la tige du chanvre, elle, est extraite après le séchage de la paille et le défibrage de celle-ci. Elle pourra elle aussi trouver plusieurs utilisations, permettant notamment de faire du paillage. Tout en limitant le développement des mauvaises herbes autour des plantes, arbustes et arbres, il permet la rétention de l’humidité, réduit le compactage des sols et conserve au jardin son aspect naturel.

    Du chanvre pour les routes ou l’isolation des bâtiments

    A Etampes, la déviation entre la RN20 et la RN191 repose sur de la fibre de chanvre.

    Mais aujourd’hui le chanvre n’est pas cantonné à ces utilisations. L’un des plus beaux exemples a été réalisé à Etampes où une route, judicieusement dénommée la route verte, a été construite à partir de chanvre. L’entreprise Charier, partenaire de Gatichanvre, a développé un procédé qui consiste en la construction de routes réalisées à partir de fibre de chanvre. Il consiste à introduire des fibres de chanvre dans la couche de forme, mêlées à du liant hydraulique. Les sols deviennent par cette transformation de véritables matériaux composites à la résistance accrue, pour des ouvrages à la fois durables et performants. Ce procédé permet en plus de réduire le coût des travaux en réduisant de 4 à 5 cm la couche d’enrobé et son entretien. Bref, un argument non négligeable.

    Le chanvre peut également servir dans la construction. Il a en effet des propriétés d’isolation qui en font une solution technique très intéressante que ce soit sous forme de laine de chanvre, de panneaux, membranes ou de parpaing de chanvre. La commune de Boigneville a opté pour l’isolation à base de chanvre. Inauguré le 21 décembre 2018, le 22e logement communal à loyer modéré bénéficie d’une isolation naturelle conçue à partir du chanvre. Les fibres longues obtenues par la transformation du chanvre permettent de réaliser des panneaux d’isolation entièrement naturels. Ils sont non irritants, non toxiques, non allergisants et doux au toucher. Suivant leur densité, les panneaux offrent différentes caractéristiques physiques, notamment de résistance thermique, souvent bien supérieures aux isolants actuels. Ainsi, le chanvre permet de réaliser de véritables économies d’énergie dans le respect de l’environnement.

    Une plante peu gourmande en eau

    A Boigneville, un logement communal à loyer modéré isolé en chanvre.

    Le chanvre a donc tout l’avenir devant lui. Sa capacité à s’adapter à des sols arides et donc à limiter l’irrigation ou encore sa résistance qui ne nécessite pas de produits fongicides ou insecticides, en font assurément une culture qui va devenir de plus en plus séduisante pour les agriculteurs.

    Teddy Vaury
    Teddy Vaury
    Teddy Vaury est rédacteur en chef du Républicain de l'Essonne. Il travaille au sein de l'hebdomadaire départemental depuis 2006.