Vigneux-sur-Seine : ils filment les artistes du street-football

Matthieu Toya et Paul Karra ont réalisé un documentaire sur le street-football. L’occasion de découvrir les bienfaits de la discipline et tordre le cou à certains clichés.

« C’est ça pour moi le City stade : un terrain synthétique, un grillage et des supporters autour. Une bande de potes, un ballon et c’était parti. » Dès les premières secondes du court-métrage, le ton est donné. Esthétique léchée, paroles fortes et intervenants de premier ordre se succèdent tout au long des quinze minutes de « Les artistes – Génération City Stade », nouveau documentaire du collectif Comme des Bavons, sorti le 16 août sur la plateforme YouTube. Au fil des minutes, on en apprend davantage sur le street-football. Prépondérance de la technique balle au pied, parité sur le terrain, mélange des générations ou encore caractère « sacré » de la discipline dans certains quartiers populaires, c’est tout un art et un univers qui se déploie. De quoi instruire, divertir et parfois surprendre pour un documentaire qui a pris une ampleur insoupçonnée de prime abord, même pour ses deux créateurs.

Montrer les bienfaits de la discipline

Installés dans leurs nouveaux locaux de Vigneux-sur-Seine, Matthieu Toya et Paul Karra peuvent avoir le sentiment du travail accompli. Sur les murs de leur espace de travail s’affichent des photos de leurs tournages. Goalkeeper, précédente réalisation de Matthieu, déjà sur le thème du football, et Génération City Stade, donc. La première création du duo depuis leur association au sein de l’association Comme des Bavons. « Après un confinement compliqué à vivre pour beaucoup de jeunes, nous cherchions une dynamique, un sujet sur la passion, explique Matthieu. Nous avons remarqué qu’avec le déconfinement, beaucoup de gens se sont mis au street-foot. L’idée est partie de là. »

Si le sujet est choisi, reste alors à en dessiner les contours. Et l’aventure va se révéler plus poussée que prévue pour les deux compères. « A l’origine, nous devions nous limiter au stade de notre quartier, développe Paul. Mais dès que nous avons commencé à faire la promotion du tournage, ça s’est propagé et nous avons fini par avoir beaucoup de contacts. A ce moment là on s’est dit : des gens sont prêts à jouer le jeu pour le film, alors on se lance. On le fait. » L’équipe de tournage de quatre personnes se lance alors sur les routes. Avec un objectif en tête : montrer les bienfaits du street-football.

Les femmes au cœur du jeu

Car loin de n’être qu’une partie de ballon, la discipline génère tout un écosystème. « C’est bien plus que du foot, confirment les réalisateurs. Pour certains quartiers populaires, c’est véritablement quelque chose de « sacré ». Derrière les matchs en eux-mêmes, il y a tout un univers. C’est là que des amitiés se créent, que des projets voient le jour. Il y a une énergie très intéressante sur ces terrains, une forme d’émancipation, de synergie qui permet parfois à de grandes choses de se développer. Footballistiquement, bien sûr, car la plupart des grands noms du foot sont passés par là, mais aussi pour la vie de tous les jours. »

Force est d’ailleurs de constater que certains aspects du street-football tordent le cou aux clichés. Outre le mélange des générations (on peut y croiser des enfants de six ans comme des quinquagénaires), c’est surtout du côté de la parité que la discipline surprend : les femmes jouent au foot, et elles le font (très) bien. Et les réalisateurs ne s’y sont pas trompés en leur accordant une très large place dans leur film. « Ça s’est fait très naturellement, notent-ils. Même si elles étaient un peu cachées au début, une rencontre impromptue à Carré Sénart avec un groupe de joueuses a tout déclenché. Il n’y avait aucune raison de ne pas montrer cette parité car, sur le terrain, le cliché des hommes footballeurs n’existe pas : seule la technique parle. On a découvert des joueuses avec des niveaux vraiment impressionnants. » Des joueuses qui n’ont « rien à envier » aux garçons comme le précise d’ailleurs Ella Kaabachi, l’une des intervenantes.

En attendant la prochaine création des deux réalisateurs, rendez-vous donc sur YouTube pour vous imprégner de l’ambiance City Stade et, pourquoi pas, avoir une furieuse envie de descendre de chez vous pour taper la balle.

 

Robin LANGE
Robin LANGE
Journaliste dans le nord de l'Essonne. Il traite notamment les sujets de Paris-Saclay.