Encadrants et responsables sportifs étaient conviés à une conférence autour de la radicalisation dans le sport.
Un prélude. Voilà comment la Préfecture et le Département résument ce premier contact avec le monde sportif essonnien, autour de la radicalisation. Jeudi 4 juillet, ils étaient une centaine à la Maison départementale des comités sportifs pour découvrir ce pan, réalité pour certains, chimère pour d’autres. Jean-Benoît Albertini, préfet de l’Essonne, s’appuie sur le récent rapport parlementaire sur les services publics et la radicalisation. « Le constat est que nous avons des difficultés à juger les phénomènes de radicalisation en milieu sportif, commence-t-il. Le milieu sportif est insuffisamment éclairé. Il y a plusieurs facteurs : nous associons le sport à un élan collectif, loin du repli sur soi et de la désocialisation. Aussi, les renseignements généraux ont du mal à rencontrer les interlocuteurs pour évaluer les situations. »
Des propos confirmés par Muriel Domenach, secrétaire général du Comité interministériel de prévention de la délinquance et de la radicalisation (CIPDR), organe central sur le sujet. « Il n’est pas facile d’aborder la radicalisation dans le sport, synonyme de tolérance et de rassemblement, poursuit-elle. Mais le monde du sport n’échappe pas à la radicalisation. Il ne faut pas faire de confusion : le sport n’est pas radicalisant, mais il peut être un facteur. » D’où ce rendez-vous pour sensibiliser les acteurs du sport, avant les premières formations à l’automne.
« Détecter les changements comportementaux »
Dans une présentation « sans stigmatisation, ni amalgame, ni paranoïa » qu’il assume «anxiogène », Médéric Chapitaux, directeur de Challenges Academia et doctorant en sociologie sur ce thème, revient sur le parcours sportif des auteurs des récents attentats en France. « On pensait qu’ils étaient déstructurés, tous passés par la prison… en réalité, le sport est le facteur aggravant. Le premier lieu de radicalisation, c’est le club de sport, devant les associations, les lieux de culte et les prisons. Le foot en salle, les sports de combat et la musculation sont les principaux lieux de radicalisation, selon le rapport Ethique et Sport de 2011. Pourquoi ? Après les incidents dans les cités en 2005, de nombreux équipements sportifs ont été créés, mais sans encadrants ! Aussi, on peut être éducateur et fiché S, quel message sera véhiculé aux jeunes ? Personne ne peut vérifier.»
L’Etat veut donc s’appuyer sur ceux qui œuvrent au quotidien : les encadrants, souvent des bénévoles non avertis. « Il faut que vous sachiez détecter les changements comportementaux, reprend-il. On ne dit pas que quelqu’un se radicalise, c’est l’Etat qui met une étiquette. » Avant de conclure sur une citation de Jean Rostand : « Attendre d’en savoir assez pour agir en toute lumière, c’est se condamner à l’inaction ».
Retrouvez cet article dans nos éditions papier et numérique du jeudi 11 juillet.