Essonne : « Grand oral, grande pagaille » scandent les professeurs

Devant le lycée du Parc des Loges à Evry-Courcouronnes, ils étaient une trentaine de professeurs à manifester ce lundi matin contre le Grand oral et plus largement la réforme du baccalauréat. Ils déplorent un manque de moyens aux lourdes conséquences. 

10h26, lundi 21 juin. Alors que Pierre Viallemonteil, professeur de Sciences et vie de la Terre est censé répondre à sa convocation au lycée Truffaut à Bondoufle pour faire passer la toute nouvelle épreuve du Grand oral aux candidats du baccalauréat, ce dernier s’est armé d’un feutre et de masques, sur lesquels il écrit : « Grand oral, grande pagaille« . En cette journée historique qui marque le lancement de cette nouvelle épreuve, il a décidé de ne pas répondre présent à la convocation afin d’exprimer son ras-le-bol. Comme lui, ils étaient une trentaine de professeurs du lycée des Parcs des Loges, à Evry-Courcouronnes, a protesté pacifiquement devant leur établissement.

« La grève du Grand oral nous semble être une action nécessaire face à un ministère qui méprise les élèves et les enseignants dans un contexte social et sanitaire des plus tendus« , ont écrit sur leur tract les syndicats Snes Fsu (premier syndicat des collèges et des lycées généraux et technologiques) , CGT Educ’action et le Syndicat général de l’Education nationale CFDT. Le Grand oral, épreuve qui se tient pour la première fois cette année, consiste en un échange de 20 minutes avec le jury, sur un sujet choisi parmi deux thèmes liés aux enseignements spécifiques des élèves. Cette épreuve se tient après l’écrit de philosophie, qui a eu lieu la semaine dernière. Ce n’est pas tant l’épreuve en elle-même qui est décriée, mais la préparation de celle-ci. Dans les détails : « Ce Grand oral, c’est : une épreuve sans heures dédiées pour préparer les élèves, ce qui renforce les discriminations sociales« , ont formulé les manifestants. En effet, pour Léon Caquant, professeur de Sciences économiques et sociales, « les élèves s’y sont préparés de manière individuelle, ce qui implique le capital culturel. En fonction de l’environnement familial, les chances de réussite des candidats ne sont pas les mêmes« .

« J’ai été convoqué pour faire passer les mathématiques, alors que j’ai fait une licence de Lettres »

L’envoi des convocations semble également problématique, certaines ayant été transmises très tardivement. Comme c’est le cas de Noémie Berger, professeur d’histoire-géographie : « Vendredi soir à 21h, on m’a indiqué que je devais faire passer le Grand oral aux élèves qui ont choisi la spécialité mathématiques… J’ai fait une licence de Lettres, je n’ai aucune formation en maths. Je ne me sens pas légitime« , confie Noémie, dépitée. Dernière raison de la discorde : les protestataires parlent « d’une épreuve aux consignes d’évaluation très floues et dotée de forts coefficients (10 pour la filière générale et 14 pour la filière technologique« . « En fonction de l’état d’esprit d’un jury, un élève peut avoir 15 ici et seulement la moyenne ailleurs, c’est totalement aléatoire« , a soufflé Léon Caquant.

En définitive, les professeurs ne demandent pas la suppression de l’épreuve, mais réclament plus de moyens. « Un oral de baccalauréat doit se concevoir avec une réelle préparation qui permettrait à nos élèves, notamment les plus en difficulté de réussir l’épreuve« , écrivent les syndicats. « Nous revendiquons donc des heures dédiées à la préparation de l’épreuve : un bloc de deux heures par semaine au cours duquel deux professeurs accompagneraient les élèves dans la définition de leur sujet, leur réflexion, leur recherche documentaire et leur présentation orale nous semble être un minimum« . Malheureusement,  ces temps en demi-groupe « ont tendance à disparaître dans les lycées avec la réduction des dotations horaires globales« .

Préavis de grève étendu sur toute la semaine

Leur préavis de grève s’étend sur toute la semaine. « En principe, l’Académie a prévu des professeurs réservistes« , fait savoir Pierre, sans inquiétude. « On ne se bat pas pour une augmentation des salaires, on se bat pour les élèves« , a insisté Léon.