Affaire Théo : Steevy Gustave dénonce « l’acharnement » dont il est victime

Ancien adjoint au maire et aujourd’hui élu (DVG) de l’opposition à la mairie de Brétigny-sur-Orge, Steevy Gustave est l’auteur d’une tribune qui dénonce les bavures policières. Elle a été publiée dans le journal Libération du 15 février. Depuis sa parution, Steevy Gustave a reçu des lettres de menaces. Interview.

Le Républicain : Qu’est-ce qui vous a poussé à prendre la plume et à écrire « Lettre d’un élu de la République à l’avenir » ?
Steevy Gustave  : « Au départ, on m’a proposé de signer des pétitions mais elles étaient trop à charge contre les policiers. Je me suis alors dit que j’allais moi-même prendre la plume pour écrire ma vérité. Et l’affaire Théo m’a inspiré. Je voulais trouver les bons mots, le bon ton. Je pensais les avoir trouvés. J’ai toujours soutenu la police. En parlant à des policiers, ils m’ont dit « tu sais, nous, on en prend plein la tête à cause de ces brebis galeuses« . Je ne suis ni juge, ni avocat, je suis un père de famille et un élu de la République. C’est en ces deux titres que j’ai pris la parole. Et le cœur de cette lettre, c’est aussi les propositions que je fais, quand je parle du contrôle au faciès, des caméras-piétons ou quand je demande une meilleure formation des jeunes policiers. Mais aujourd’hui, cette force de proposition est occultée par la tournure politique que prend ma tribune.

Le Rép. : Le jour même de la publication dans le journal Libération, Jean-Marc Falcone, directeur général de la Police nationale a écrit un communiqué dans lequel il s’insurge contre un passage qui porterait de « graves accusations de racisme contre les policiers« . Comment vivez-vous cet emportement ?
S. G.  François Fillon a même dit, lors de son déplacement à Compiègne que « le ministre de l’Intérieur devrait porter plainte contre les auteurs de la tribune accusant de racisme les policiers« . J’écris pourtant noir sur blanc : « Ces monstres ne peuvent être associés aux forces de l’ordre qui nous protègent et sauvent des vies au péril des leurs. Non, ces agents du désordre sont bel et bien des brebis galeuses« . J’ai passé deux nuits blanches à écrire ma lettre. J’ai demandé conseil à des amis policiers, des avocats, personne ne m’a dit que je faisais un amalgame. Aujourd’hui, on m’accuse d’avoir écrit une lettre anti-policiers. C’est un langage de sourd, comment voulez-vous qu’on avance ?

Le Rép. : Vous dites que la République, votre République doit être irréprochable. En tant que Pupille de la Nation et fils de militaire, vous condamnez autant les violences à Viry-Chatillon que l’affaire Théo. Pourquoi cet emballement politique ?
S. G.  : C’est hallucinant. J’en avais juste marre de voir que des pommes pourries salissaient l’image des policiers, que je respecte et que j’ai toujours respectée. Je parle bien d’une minorité de fonctionnaires. Quand on parle des « jeunes de banlieue » c’est aussi faire une généralité pourtant tout le monde sait qu’on ne parle que de ceux qui mettent le bazar. Je sais que les policiers font un travail très dur et parfois mettent leur vie en péril mais en même temps, il faut aussi le dire, il y a certains policiers qui font des bavures. On sait dire le nombre d’outrages et rébellions contre des agents, mais on n’a aucun chiffre sur les bavures policières. Et on ne les aura jamais ! Je ne comprends pas cet acharnement, j’ai reçu des lettres de menaces et j’ai des partisans du Front national sur mon dos. On me fait un faux procès. Mais je ne lâcherai pas, je continuerai le combat.

Le Rép. : Regrettez-vous d’avoir écrit cette tribune, qui a été signée par de nombreux artistes (Anne Roumanoff, Passi, Patrick Bruel…), des avocats, journalistes, chercheurs ?
S. G.  : J’aime la Justice et aujourd’hui je pense que c’est injuste. Si je ferme ma bouche, si tout le monde ferme sa bouche, qui est-ce qui restera ? Les haineux, ceux qui me pointent du doigt. Et ce n’est pas ma France. Je regrette que les gens aient mal compris, ou par malhonnêteté intellectuelle et qu’ils me fassent un faux procès. Je parle des policiers qui ont été tués pour nous protéger : Ahmed, Clarissa, Aurélie… Ce qui m’intéresse, c’est être force de proposition. Je suis prêt à travailler avec la police, avec les associations, comme je l’ai toujours fait depuis 30 ans. Cette tribune, c’est avant tout un appel au calme.»