Des assistantes pour les enfants en situation de handicap (AESH) en Essonne souffrent du manque de personnel et de soutien. Elles déplorent des conditions de travail dégradées.
« On fait un métier qui n’est pas reconnu, pas accompagné et mal payé, c’est inadmissible alors que notre travail est précieux. On est parfois attendu comme le Messie par des familles et les professeurs, confie Delphine*, AESH et conseillère déléguée au Handicap dans une commune de l’Essonne. Tous les matins, je me lève et je sais que je suis utile pour les enfants. »
Pour la rentrée 2022-2023, l’Académie de Versailles, en charge des établissements scolaires de l’Essonne, précise que plus d’une centaine de nouveaux contrats d’AESH ont été signés et reconnaît que « ce poste est, comme nombre de métiers du médico-social, sous tension ». Des recrutements complémentaires sont prévus aussi par le département de l’Essonne.
Un outil de gestion jugé mal ordonné
Cette situation met à mal la scolarité des enfants porteurs de handicap. Dans l’Académie de Versailles, ils sont 28.363 élèves scolarisés en classe ordinaire de la maternelle au lycée et il y a 645 unités localisées pour l’inclusion scolaire dont 84 en Essonne (données de janvier et juin 2022).
Depuis la mise en place des Pial (Pôles inclusifs d’accompagnement localisés) pour répartir les AESH sur un secteur donné avec plusieurs établissements, les principaux concernés constatent des conditions de travail de plus en plus difficiles. Ils doivent être mobiles, avec un emploi du temps sur-
chargé, avec parfois trois élèves en même temps dans la même
classe, sans prise en compte des heures accordées pour les échanges avec les familles et pour les préparations pédagogiques ponctuelles, comme la saisie de documents adaptés ou la réalisation de fiches de révision. L’Essonne compte 58 Pial dans l’enseignement public et deux Pial dans l’enseignement privé.
Un emploi du temps surchargé
Laurence* est AESH depuis plus de trois ans en Essonne : « Selon moi, le gouvernement cherche avant tout à faire des économies plutôt que de recruter du personnel. La circulaire n° 2019-088 du 5 juin 2019 sur l’école inclusive prétend que « le Pial repose sur un accompagnement humain au plus près des besoins de l’élève en situation de handicap. » Or, le Pial a uniquement pour but de remplir les cases dans l’emploi du temps d’un AESH. J’ai connu une élève qui aurait eu besoin d’aide pour d’autres cours que ceux où je l’accompagnais, mais sur des créneaux horaires où j’étais indisponible. Les besoins de cette élève n’ont donc absolument pas été pris en compte, mais la solution s’est avérée plus rentable pour l’administration qu’un nouveau recrutement. »
Delphine a appris à la rentrée qu’elle ne suivrait plus une élève qu’elle accompagnait depuis deux ans : « Il m’a fallu un an pour tisser des liens solides. Cette année, elle passe le Bac, c’est déterminant et je ne serai pas là pour elle ».
Qui pour tenir bon ?
Le métier est précaire et peu attractif : cumul de CDD, salaires faibles et pas de perspective d’évolution de carrière. Delphine affirme qu’il est « indispensable d’avoir une situation stable à l’extérieur du travail pour tenir le coup ». Sa collègue Laurence confirme : « A mon âge et en étant célibataire, j’ai peur de me retrouver sans emploi. Je n’avais jamais trouvé le métier stressant avant la mise en place des Pial. Heureusement, les professeurs sont d’un très grand soutien ».
• *Témoignages anonymes : les noms
ont été modifiés.